Expo_grenoble_1925.png Source. En 1925, Paul Mistral, le maire de Grenoble à l'époque, voit réaliser une de ses grandes ambitions pour la ville, l'Exposition internationale de la Houille Blanche et du tourisme. Les deux représentent les gros pôles du développement à Grenoble à l’époque. La Houille Blanche (énergie hydraulique) vient d'être découverte et présente une mini-révolution industrielle dans cette région montagnarde. Le tourisme se développe grâce à la découverte de l'automobile, les constructions des premières autoroutes qui permettent un accès plus facile à la montagne, et les premières lignes d'autocar. On est dans une époque de croyance au progrès technique, qui permettra l’exploration des terres “encore sauvages” dans les montagnes et bien sûr dans les colonies.

village_africain_2.jpg L'exposition a donc lieu en 1925. Il est intéressant de voir les noms des pavillons et d'essayer de les classer, de voir quel récit émerge des logiques thématiques proposées: Un des plus grands pavillons est évidemment le pavillon de la Houille Blanche où on peut trouver des appareils électroniques, des explications de la technique hydraulique, alors c'est vraiment autour d’une célébration de tout ce qui est technique. Dans le palais du tourisme sont représentées les régions françaises, mais aussi l'office nationale du tourisme, l'Automobile Club, le Touring club français, l'Aéroclub et le Club Alpin Français les Transports et Industries Touristiques. Le progrès doit devenir évident en opposition du Palais du tourisme d'autrefois.

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Ensuite il y avait des palais qui représentaient un ou plusieurs pays et à côté il y avait le palais des colonies. En opposition de du progrès et de la modernité le visiteur pouvait trouver le village africain avec des cases et constructions éphémères. Dans un communiqué on peut lire que “l'exotisme fascine apparemment les visiteurs” du village. village_africain_3.jpg Source

Des chercheurs de l’ACHAC ont travaillé sur ces zoos humains et ont découvert que les personnes qui les personnes africaines dans “le village africain”, étaient venu des colonies françaises avec un contrat de travail, payé pour jouer le sauvage, le primitif, le traditionnel.

Un exemple récent qui montre que cette histoire est encore présente aujourd’hui est que le grand-père de Karembeu, le joueur d'équipe national français avait été embauché dans le cadre de ces zoos humains. Dans un interview il expliquait pourquoi, en étant kanak, il ne chantait jamais l'hymne national. Son grand père était à l'époque un des rares instituteurs kanaks de la Calédonie et il s'était engagé de venir à une exposition universelle en croyant que c’était une occasion de faire connaître la culture kanake. Une fois arrivé en France, on l’avait habillé en pagne alors que c'était l'hiver et la pagne ne fait pas partie des coutumes locales. Karembeu raconte qu’il est mort de froid, de faire le sauvage alors qu'il était quelqu'un de lettré.

Zoos humains from Groupe de recherche Achac on Vimeo.

Ce qui nous intéresse ce ne sont pas tellement les pavillons en soi mais ce qu'ils racontent dans leur ensemble. Notamment à travers de cette image où on voit la tour Perret, qui éclaire dans le noir, représente le pays de Lumières, éclaire l'obscurité du monde et notamment le continent africain. Ce récit contribue à la construction de la modernité face aux traditions inventées ou mis en scène. Tous ces villages étaient créés par des architectes français, puisant dans leur représentation de ce que c'était l'Afrique, la tradition. Le rôle de cette exposition est donc de diffuser ce récit de la modernité se juxtaposant à la tradition. Et c'est toujours ce récit-là qui permet, qui justifie l’exploit impérialiste et colonialiste. À cette époque-là, 1925, il est à son comble. Il est le moins contesté. grenoble-exposition-1925_tour_et_pavillon_des_colonies_nuit.jpg

La tour Perret qui est très présente, domine et apporte de la lumière dans la nuit, comme la modernité doit éclairer les ténèbres. Source d'image.

Pour finir l'histoire: l'expo durait de mai à août 1925 et pendant ces 4 mois 1 millions de visiteurs sont venus. On peut faire un parallèle entre l'exposition et le Disneyland actuel au niveau des discours modernistes et nationalistes.

Ensuite, a plupart des bâtiments fut rasé après la fermeture de l'exposition pour laisser la place au Parc Paul Mistral. Ce qui a survécu le plus long temps est le grand palais de la Houille Blanche. La seule chose qui reste aujourd’hui est la tour Perret.